Actualités

Publications

Cautionnement et mentions manuscrites de la caution – Lettre d’information de juillet 2022

Lettre d’information du 21 juillet 2022  (PDF) 

Un important formalisme existait en matière de cautionnement jusqu’au 31 décembre 2021. Tous les actes de cautionnements conclus par acte sous seing privé par des cautions personnes physiques non-commerçantes au profit de créanciers professionnels impliquaient l’apposition de mentions manuscrites strictes (prévus, selon le cas, par les anciens articles L. 314-15, L. 314-16, L. 331-1 et L. 331-2 du Code de la consommation).

L’ordonnance du 15 septembre 2021, entrée en vigueur le 1er janvier 2022, a fortement simplifié les règles applicables en la matière, tout en favorisant le recours aux signatures électroniques, en abrogeant les articles susvisés du Code de la consommation, en modifiant l’article 1175 du Code civil et en insérant à l’article 2297 du Code civil des règles communes applicables par principe aux cautionnements :

« A peine de nullité de son engagement, la caution personne physique appose elle-même la mention qu’elle s’engage en qualité de caution à payer au créancier ce que lui doit le débiteur en cas de défaillance de celui-ci, dans la limite d’un montant en principal et accessoires exprimé en toutes lettres et en chiffres. En cas de différence, le cautionnement vaut pour la somme écrite en toutes lettres.

Si la caution est privée des bénéfices de discussion ou de division, elle reconnaît dans cette mention ne pouvoir exiger du créancier qu’il poursuive d’abord le débiteur ou qu’il divise ses poursuites entre les cautions. À défaut, elle conserve le droit de se prévaloir de ces bénéfices. »

Grande innovation, l’article 2297 du Code civil n’impose ainsi plus une mention manuscrite de la caution permettant ainsi la dématérialisation de celle-ci et, par voie de conséquence, la conclusion de cautionnements par voie électronique, selon les modalités prévues pour la validité des actes passés électroniquement, dès lors que le processus de signature par lequel l’acte est renseigné par la caution garantit que l’apposition de la mention résulte d’une démarche qu’elle a elle-même réalisée (comme le prévoit le deuxième alinéa de l’article 1174 du code civil ¹).

L’article 26 de l’ordonnance du 21 septembre 2021 a plus généralement autorisé la dématérialisation des sûretés dans leur ensemble en supprimant le 2° de l’article 1175 du Code civil qui interdisait jusqu’alors, pour les actes sous signature privée relatifs à des sûretés personnelles ou réelles, de nature civile ou commerciale (sauf s’ils étaient passés par une personne pour les besoins de sa profession), l’apposition sous forme électronique d’une mention lorsqu’il était exigé par un texte une mention écrite de la main même de celui qui s’oblige (comme c’était le cas en matière de sûretés).

De manière très concrète, le terme « apposer » interdit les mentions déjà écrites ; que ce soit sous format électronique ou manuscrit, la caution doit écrire elle-même le texte visé, à la main ou de manière dactylographiée et ne peut pas se contenter de signer l’acte concerné qui contiendrait la mention déjà apposée.

Mandataire de la caution

Comme sous l’empire du droit ancien, la mention de la caution ne pourra pas être valablement apposée par un tiers, sauf à ce que, conformément à l’alinéa 3 de l’article 2297 du Code civil, ce tiers ait reçu mandat de la personne physique qui se porte caution et que ladite caution mandant ait apposé la même mention¹.

Contenu de la mention

Contrairement au modèle impératif à respecter à la lettre qui était prévu par le Code de la consommation, la mention de l’article 2297 n’est plus sacramentelle, ce texte n’imposant pas de formulation donnée. La caution doit ainsi désormais simplement indiquer dans l’acte de cautionnement qu’elle s’engage en qualité de caution à payer au créancier ce que lui doit le débiteur en cas de défaillance de celui-ci, dans la limite d’un montant en principal et accessoires exprimé en toutes lettres et en chiffres, étant précisé qu’en cas de différence, le cautionnement vaudra pour la somme écrite en toutes lettres (article 2297 alinéa 1er du Code civil).

En l’absence de texte impératif, un nouveau contentieux risque de surgir en la matière sur le contenu de la mention. Il appartiendra alors aux juges du fond d’apprécier si la mention était suffisante pour assurer l’information de la caution quant à la portée de son engagement.

La caution ne peut être privée des bénéfices de discussion ou de division que si elle reconnait expressément dans la mention apposée ne pas pouvoir exiger du créancier qu’il poursuive d’abord le débiteur ou qu’il divise ses poursuites entre les cautions ; à défaut de telles stipulations, elle conservera le droit de se prévaloir de ces bénéfices (article 2297 alinéa 2 du Code civil).

En d’autres termes, l’absence de cette seule mention n’entraînera pas la nullité de la caution mais seulement celle de la stipulation de solidarité et de renonciation au bénéfice de discussion².

L’apposition de la mention n’est par ailleurs pas obligatoire pour les cautionnements (i) souscrits par les personnes morales (ii) ni pour ceux consentis par des personnes physiques par acte notarié ou par acte sous signature privée contresigné par un avocat (article 1369 alinéas 2 et 3 du Code civil ; article 1374 alinéas 1 et 3 du Code civil).

Sanction

Le formalisme requis par l’article 2297 du code civil est sanctionné par la nullité. Sous l’empire des textes antérieurs, la Cour de cassation avait décidé qu’il s’agissait d’une nullité relative. Protégeant l’intérêt privé de la caution et non l’intérêt général, ladite nullité est très vraisemblablement toujours une nullité relative (article 1179 du Code civil).

Il s’ensuit que le cautionnement irrégulier peut donc être confirmé par la caution, par exemple par son exécution volontaire, comme cela été admis en cas d’irrégularité de la mention prescrite par le Code de la consommation pour le cautionnement d’un crédit à un consommateur¹.

Illustration : cas particulier du cautionnement dans le cadre d’un bail d’habitation

Conformément à l’alinéa 5 de l’article 22-1 de la loi du 6 juillet 1989, et à peine de nullité du cautionnement, toute personne physique qui se porte caution d’obligations résultant d’un contrat de location d’habitation doit signer l’acte de cautionnement faisant notamment apparaître le montant du loyer et les conditions de sa révision (tels qu’ils figurent au contrat de location) et apposer la mention prévue par l’article 2297 du Code civil à savoir qu’elle s’engage en qualité de caution à payer au créancier ce que lui doit le débiteur en cas de défaillance de celui-ci, dans la limite d’un montant en principal et accessoires exprimé en toutes lettres et en chiffres.

L'équipe :

Publications